mardi 19 mai 2015

Blaq Poet - Rewind << Deja Screw (2006) (Queens, NY.)

Blaq Poet c'est Wilbur Bass, un type sorti tout droit du Queensbridge (dans le Queens donc, au bord de Manhattan) d'où viennent entre autres Nas, Mobb Deep, Marley Marl, Tragedy Khadafi et Redman, pour ne citer que les plus connus. Un vaste lieu au sein de la Grosse Pomme où ces rappeurs ont grandi mais surtout où ils y ont fait leurs armes. Et question de faire ses premiers pas, Blaq Poet les as faits très tôt. Ses débuts remontent dans la seconde partie des années 80 - il portait alors le pseudo Poet - où il enregistra un single bien sympa ("All Hell Breakin' Loose") mélangeant hip-hop et freestyle. Quelques années après (1991) il s'associa avec un gentil garçon - Hot Day - avec lequel il grava un album - Without Warning - sous le nom de PHD (initiales de Poet et Hot Day), pour enfin terminer sa course avec Screwball (connus en particulier pour "F.A.Y.B.A.N." ; un morceau qui sera produit par DJ Premier himself). Courant 2005/06 c'est l'heure de son 1er album solo ; soit près de 20 ans après le début de sa carrière. Assez rare pour être signalé.

Donc Rewind << Deja Screw. 18 pistes. Pas de skit ni interlude. 64 minutes ininterrompues où le rappeur nous délivre (avec le concours de quelques feats bien sentis) une prestation sinon de très haut vol, du moins plaisante voire trippante ("Watch Your Back", "My Nigga", "Rhyme Crime Boss" et "Hard to Believe" qui sortent du lot). La galette est dans son ensemble très régulière, ne laissant quasiment aucune place à l'approximation en terme de qualité. Les morceaux sont tous bien ficelés et, hormis les quatre cités plus haut - aucun ne se départit vraiment. En revanche, ce qui saute aux oreilles (du moins les miennes), c'est non pas la, mais les productions. 6 différents gonzes aux manettes pour se répartir les 18 pistes, dont près de la moitié reviennent à Généraldo de 45 Scientific (équipe frenchie, cela dit au passage) balançant un son que je découvre et qui tabasse sévère (je pense notamment à "Hard to Believe" ; lequel m'a quand même bien scotché). Le reste des producteurs c'est du bien lourd, du très lourd. DJ Premier sur 4 morceaux ("Watch Your Back" me vient en tête car addictif), Blaq Poet avec lui aussi 4 titres ("My Nigga" et "Rhyme Crime Boss" particulièrement), Easy Mo Bee sur "You Fucked Up" et le fameux Alchemist avec le lancinant "Bloody Mess" où il est justement question du Queensbridge. Les réputations sont donc à la hauteur. Pas de remplissage dans ce long courrier. Pourtant au départ j'étais un peu dubitatif du fait des 18 pistes sans aucune coupure en son sein. Nope, que dalle. Et, étonnement, tout est passé comme une lettre à la poste malgré deux chansons un peu en-dessous ("Psycho", "The Cash, Part. 2"). Mais elles se trouvent à la fin. Le meilleur avait déjà fait son effet sur mes esgourdes.
Alors voilà, dix ans après sa sortie, ce Rewind << Deja Screw est une très bonne surprise dans le monde du hip-hop des années 2000. La "faute" à qui ? à un Blaq Poet qui dispense d'un flow et d'une rime à la fois fine et suffisamment hardcore pour que l'opus remporte mes suffrages, ce à quoi il faut ajouter la fine brochette de producteurs qui ont brillé derrière la console. Un usage tout-à-propos de celle-ci ayant permis la création d'univers multiples à travers les 18 titres.
Au final j'ai envie de dire que Blaq Poet est un putain de emcee, d'autant plus terrible qu'il n'est pas connu lorsqu'il s'agit de nommer les meilleurs rappeurs new new-yorkais. Et pourtant il nous donne une sacrée mandale sans jamais faillir ou décevoir.
Hip-hop heads, allez l'écouter, vous ne serez ravis.

Recommandé : ++

1 Bang This 3:09
2 Ghetto S**t 3:40
3 Message From Poet 2:51
4 Bomb S**t 4:36
5 Bloody Mess 4:01
6 Watch Your Back 3:35
7 The Cash 3:18
8 My Ni**a 3:39
9 What Ya'll Gonna Do? 3:40
10 Poet Has Come 4:06
11 You F**ked Up 3:36
12 After All This Time 3:28
13 Rhyme Crime Boss 4:06
14 Hard to Believe 3:27
15 Psycho 3:03
16 Still Flippin' 3:23
17 The Cash Pt. 2 3:02
18 Mind of a Criminal 3:52

Label: Traffic / TEG-2426


lundi 18 mai 2015

Da King & I - Contemporary Jeep Music (1993) (Brooklyn, NY.)


Da King & I ? me demanderont certains. A ceux-là je répondrai qu'il s'agit d'un duo composé de MC Izzy Ice et de DJ Majesty. Les compères nous viennent tout droit de Brooklyn. Cinq ans auparavant, ils avaient enregistré un single ("Soulman / Funky Freestyle", Scottfree Records SF1001) sous le nom de Izzy Ice and DJ Majesty.
Donc Da King & I. Un groupe dont je n'avais pas entendu parler jusqu'à ce lundi de Pâques 2014. Sorti en 1993 alors que le flot hip-hop était à son apogée, 'Contemporary Jeep Music' est passé quasiment inaperçu, d'autant plus sur le petit label géorgien Rowdy Records. Un très bon disque mélangeant habilement un hip-hop boombapien et de nombreuses sonorités jazzy. Le duet new-yorkais délivre là une bonne perf, malheureusement laissée sans suite.
Recommandé : ++
A noter un remix du morceau "Flip da Scrip" par DJ Premier sur le single du même nom.

Highlights: Krak da Weazel, Tears, Mr. All That, Represent, et Crack da Weasel (Dat Other S***)

1 Contemporary Jeep Music
2 Let's Take a Trip
3 Flip da Scrip
4 Interlude 1 / MC Asshole
5 Krak da Weazel
6 Interlude 2 / Amusement Park
7 Brain 2 U
8 Tears
9 Soul Shack Interlude
10 Ghetto Instinct
11 Mr. All That
12 Interlude 3 / Jazz Skit
13 This Is How We Do
14 Interlude 4 / Izzy Sings da Blues
15 Lost My Mind
16 Represent
17 Crack da Weasel (Dat Other S***)
18 What's Up Doc

Label: Rowdy / 75444-37001-2


dimanche 17 mai 2015

Big L - Lifestylez ov da Poor & Dangerous (1995) (Manhattan, NY.)

Lamont Coleman, aka Big L, signe là son 1er album, qui sera également son dernier de son vivant puisque son 2è opus The Big Picture est sorti en juillet 2000, soit 1 an et demi après sa mort.
Lifestylez ov da Poor & Dangerous sort donc au printemps 95 sur le gros label Columbia (seul Nas si ma mémoire est bonne, avait été endorsé par ce label pour son 1er album 'Illmatic' en 1994).
Rare pour être signalé dans le monde du hip-hop que d'être signé par une major pour un premier jet. Ainsi, le niveau de l'album est à la hauteur de la taille-patron de la maison de disque ; à savoir une montagne.
12 morceaux et un peu moins de 50 minutes plus tard, vous voici face à un espèce de croisement entre pièce-maîtresse du rap et mysticisme à travers la disparition du monsieur. A l'instar de Notorious BIG, ou encore 2Pac (à peine 25 ans), Big L est rentré dans la triste cour des rappeurs n'ayant pas franchi cette fameuse barre, mais aura laissé une empreinte indélébile dans le monde du hip-hop par le biais de cet unique opus (sans compter son apport avec le supergroupe D.I.T.C.)
Au final c'est un full-length à la fois sombre et boosté par le débit de Big L, peu ou pas de temps-morts pendant les 50 minutes, et pas de morceaux faibles. La sève de la rime coule pleinement le long des lèvres du chanteur, nous distribuant par-là même des salves ininterrompues avec un flow boom-bapien propre à la scène east-coast.
Certes le contenu de la galette n'est pas à la fête, mais quand c'est fait avec talent et élégance, ça en devient de l'art.
Essentiel.

1 Put It On 3:38
2 MVP 3:39
3 No Endz, No Skinz 3:29
4 8 Iz Enuff 4:58
5 All Black 4:21
6 Danger Zone 3:37
7 Street Struck 4:09
8 Da Graveyard 5:23
9 Lifestylez ov da Poor & Dangerous 3:21
10 I Don't Understand It 4:20
11 Fed Up With the Bullshit 3:52
12 Let 'Em Have It "L" 3:57

Label: Columbia / CK 53795

Smarki Smark - Najebawszy EP (2005) (Pologne)

Il m'arrive parfois d'écouter des productions de hip-hop qui ne soient pas en anglais ou français. Mais de façon générale, celles-ci sont soient instrumentales, soient elles impliquent en grande partie des lyrics en anglais.
Mais ici, l'on a affaire à du polonais. Alors soit on a de la famille qui peut nous expliquer de quoi il s'agit, soit on gaule que dalle. C'est mon cas. Alors évidemment c'est chaud du slibard de rien piger, alors on s'en réfère aux beats et aux flow. Perso dans le rap, il faut que je comprenne de quoi il est question sinon je trouve que ça n'a pas vraiment de sens. Toutefois il existe des exceptions quand le type qui est au micro se voit accompagné d'un background sonore qui déchire sa maman. C'est ce qui se passe pour cet EP.
C'est pas nouveau, j'adore le le hip-hop quand il est servi à la sauce jazz, qui plus est dans une dynamique boom-bap façon east-coast.
Cherchez des albums "ésotériques" sur la toile c'est un peu mon dada. Le genre de production se trouvant sous les radars, que tu découvres et au final, tu te dis que c'est une bombe qui mérite d'être connue par le plus grand nombre.

Smarki Smark est de ceux-là. Un Polonais qui débite dans sa langue natale c'est osé. Bah oui, réfléchis mon pote. Tu viens d'un pays où le rap n'est pas la discipline n°1, tu commences ta carrière et tu te radines avec un EP dans une langue que personne ne capte. Alors oui c'est foutrement osé ne serait-ce que commercialement. Va vendre ton matos au reste de l'Europe et aux States après, et tu viendras m'en reparler.
Bien entendu je ne voulais pas m'arrêter à une seule écoute car la zik proposée est vraiment excellente. 30 minutes, 7 morceaux distillés sans encombre, aucune faute de goût, des beats bien sentis, un débit vocal fluide et léger. Tout pour vous faire passer une demi-heure agréablement. 

1 Kawałek O Rapie (Oko za oko, rym za ząb) > Morceau de rap (Œil pour œil, dent pour rime) 3:59
2 Kawałek O Pieniądzach (8333.333 Euro) > ...sur l'argent 3:36
3 Kawałek O Miłości (Amyawy) > ...sur l'amour 2:57
4 Kawałek O Niczym Konkretnym (Dźwięki stereo) > ...rien de concret 4:56
5 Kawałek O Ściemnianiu Panien (Po pierwsze) > ...sur les femmes (pour commencer) 5:20
6 Kawałek O Wspomnieniach (Sweet memorise) > ...de souvenirs 4:32
7 Kawałek O Życiu (Najebawszy theme) > ...sur la vie 4:17

MC Solaar - Prose combat (1994) (Paris, FR.)

Non content de contenir cinq hits que sont "Obsolète", "Nouveau Western", "À la claire fontaine", "La concubine de l'hémoglobine", "Séquelles" qui ont fait mouche à l'époque, Prose combat est avec L'École du micro d'argent de IAM, Où je vis de Shurik'N ainsi que Opéra Puccino d'Oxmo, l'album français référence des années 90 en matière de hip hop, en matière de textes intelligents, très bien écrits, un beat nickel, une prose en béton armé. Ça tombe bien puisque c'est le combat de cet album ; la prose.
MC Solaar est selon moi la quintessence du rap/hiphop français toute époque confondue. Il est celui qui manie le mieux les mots, les marie là où l'on n'aurait pas idée de les associer. Je l'écoutais quand j'étais ado, je l'écoute toujours avec autant de plaisir, décelant par-là même beaucoup mieux les subtilités de la langue et les jeux de mots qu'il nous balance à tout-va. Un poète de la rime intelligente disais-je donc. Pour sûr. Ce mec a la rime, et la voix qui se pose parfaitement sur ce qu'il raconte. Et même lorsqu'il s'associe à d'autres rappeurs ("L'NMIACCd'HTCK72KPDP" et "Relations humaines") ça reste bon et le flow n'est pas dénaturé. Toutefois Solaar seul se suffit à lui-même dans la qualité de l'interprétation et de la présence. Il pourrait chanter a cappella qu'on n'aurait rien à y redire. "Séquelles" par exemple, qui est selon moi un des titres-phares de l'album, pourrait très bien se chanter de cette manière car le texte s'y prête. De la même façon "La concubine de l'hémoglobine" pourrait l'être.
Ce deuxième essai de Claude M'Barali est une petite pépite de rap, une perle de rimes liées les unes aux autres, des morceaux qui sont autant de références littéraires, artistiques, historiques, des clins d’œil incessants aux belles lettres, aux métaphores, et parfois il divague et digresse sur des vagues relatives au sexe ou assimilé, mais jamais le bonhomme ne tombe dans les travers si souvent répétés de la sombre et pernicieuse vulgarité du genre. Il est digne et classe, et ça c'est pas courant pour être mentionné. J'ai toujours aimé le boulot du type et la personne. Humble, réservé, correct, poète, intelligent, cultivé. Enfin l'artiste dont tout le monde rêve. Un homme qui n'ouvre pas sa bouche à tort et à travers comme beaucoup dans ce milieu. C'est respectable et ça fait du bien.
Alors à la fin des 15 titres, on en sort ravi et la qualité d'ensemble est très bonne. Une production propre sans être lisse, pas de point faible ni de chichi.
MC Solaar signe là un opus majeur faisant date.

Prose combat est un album subtil...très subtil.


1 Aubade 0:35
2 Obsolète 3:04
3 Nouveau Western 4:34
4 A la claire fontaine 2:58
5 Superstarr 3:05
6 La concubine de l'hémoglobine 4:49
7 Dévotion 4:26
8 Temps mort 3:41
9 L'NMIACCd'HTCK72KPDP 5:04
10 Séquelles 3:37
11 Dieu ait son âme 4:46
12 A dix de mes disciples 3:45
13 La fin justifie les moyens 4:57
14 Relations humaines 3:28
15 Prose combat 3:06

Label: Polydor / 521 289-2

MC Solaar - Qui sème le vent récolte le tempo (1991) (Paris, FR.)

C'est à 22 ans que MC Solaar signe son 1er album ; un des tous premiers albums de rap français digne de ce nom. Loin du niveau de maturité de Prose combat qui viendra 3 ans plus tard, le bonhomme nous lègue ce qui se fait de mieux à cette époque dans l'hexagone, et pourtant il y a pas mal de failles dans ce premier essai. Mais également quelques satisfactions ("Victime de la mode", "Caroline" et "Armand est mort").
France, 1991, rap. Trois mots qui ne vont pas forcément de paire au début des nineties, là où seuls quelques groupes avaient sortis le bout de leur nez de façon probante (NTM, Assassin, IAM).
MC Solaar tente malgré tout d'imposer sa patte et son style. Encore très jeune mais avec la rime déjà en devenir, il nous propose des sujets à la fois léger ("Ragga Jam"), nostalgique ("Caroline") et pesants, voire difficiles ("Quartier nord", "La devise", "Armand est mort").
Lire cet album, c'est presque lire le chapitre d'un livre dans lequel des paragraphes seraient dédiés aux expériences passées du monsieur. Certes, le niveau musical ne gravite pas dans les hautes sphères du hip-hop, mais l'album a au moins le mérite de proposer une lecture fraîche et enjouée de ce que MC Solaar a à témoigner.
On lui fera donc grâce du manque de consistance que représente ce premier opus, manquant cruellement d'assise technique, il s'appuie néanmoins sur du vocabulaire recherché à la rime bien rincée; le flow saccadé symptomatique d'un rap naissant en France, aux accents funk et jazzy en sus.

Un album historiquement (en France) très important dans le paysage pré-pubère du hip hop. Et rien que pour la quasi primeur de sa sortie, on se doit de le saluer et lui donner une place de choix.

1 Intro 1:00
2 Qui sème le vent récolte le tempo 4:13
3 Matière grasse contre matière grise 3:24
4 Victime de la mode 3:10
5 L'histoire de l'art 3:25
6 Armand est mort 3:07
7 Quartier nord 3:08
8 Interlude 0:30
9 A temps partiel 3:47
10 Caroline 4:43
11 La musique adoucit les mœurs 5:02
12 Bouge de là (Part. 1) 3:10
13 Bouge de là (Part. 2) 3:04
14 Ragga Jam 5:06
15 La devise 3:39
16 Funky Dreamer 1:13

Label: Polydor / 511


Funky DL - Classic Was the Day (1997) (Hackney, UK)

Dans la catégorie "albums sous les radars qui déchirent", je demande Classic Was the Day.
Naphta Newman, aka Funky DL est un mec qui vient de l'est londonien et sort ici son premier opus à tout juste 19 ans. Après avoir trouvé l'info, j'ai été étonné par son âge dans la mesure où on sent déjà une maturité à l'écouté des 17 pistes. Le style est léger, fluide, smoothie et foutrement addictif. Le style ok, mais les lyrics également. Loin des considérations politiques, gangsta ou encore hardcore de certains rappeurs, Funky DL part à l'assaut d'un hip-hop fortement imprégné de jazz, ou de jazz imprégné de hip-hop. C'est intervertible dans ce cas présent, et ça donne encore plus de force à cet album. Pas figé pour un sou.
Comme il l'explique lui-même sur son site, il a grandi dans les sons de De La Soul, A Tribe Called Quest et Pete Rock & C.L. Smooth. En gros, que des pointures du jazz-rap du début des années 90. Et ça se sent, et pas qu'un peu. Dans nombre de morceaux, l'ombre des deux derniers est carrément là. On s'y croirait. Les mélodies sont fines bien souvent mariées à un piano typé lounge ("20-20-8-8", "On Ya Own", "Pink Panther", "It's About Time") qui donne cette sensation de bien-être. Et parfois c'est au saxophone de jouer les accompagnateurs ("Worldwide", "If I Had a Day to Live"). Ce à quoi l'on peut rajouter des guitares de-ci de-là en background, et des associations en featuring sur quelques morceaux. Les patchworks ne manquent donc pas tout au long des 67 minutes; lesquelles s'enchaînent sans aucun skit ni interlude, ça vaut la peine de le signaler.

Un bien beau long-métrage, surtout pour un premier essai à seulement 19 piges.
Découverte printanière très intéressante. 

1 32 Bar Summary 2:29
2 I've Lost My Microphone 4:10
3 Underground Hip-Hop 4:18
4 20-20-8-8 3:53
5 On Ya Own 4:23
6 Pink Panther 4:09
7 Confidential Information 4:01
8 Worldwide 4:55
9 Soul Silhouette 4:07
10 Classic Moves 4:40
11 Queen of Diamonds 3:48
12 Off Key 3:13
13 Make Decisions 4:16
14 Circles (Going Round) 3:41
15 Eye Remember 4:24
16 If I Had a Day to Live 4:24
17 It's About Time 4:49

Label: Utmost / UTMCD01


mercredi 13 mai 2015

Kool Shen - Dernier Round (2004) (Saint-Denis, FR.)

Bruno Lopes, aka Kool Shen est évidemment l'associé de Joey starr au sein du Suprême NTM. Bien loin des battages médiatiques d'un Joey Starr exubérant et caractériel (du moins à l'époque), il a incarné durant les années 90 l'homme de l'ombre du duo du 9-3, la force tranquille et la tête froide. Pourtant derrière les textes se cache sa patte (le plus souvent), la richesse des rimes lui sont dû pour la majeure partie.

J'ai toujours eu beaucoup d'estime pour ce type, lui le gosse d'immigrés portugais qui a grandi dans la banlieue de Seine-Saint-Denis au beau milieu de la culture hip-hop du début des années 80. A l'instar d'Akhenaton, il a donné un coup de pied dans la fourmilière de la bien-pensance française à une époque où le rap n'avait pas bonne presse. Alors qu'avec NTM, l'ambiance était plutôt centrée sur un hip-hop hardcore sans concession, le voici en 2004 avec un 1er album solo dans lequel il dresse le bilan de son parcours, et par extension celui de NTM. Il y parle de ses débuts ("On a enfoncé des portes"), des choses qui n'évoluent pas dans la société et les mentalités figées ("C'est mal barré"), il évoque également la perte de son ex-compagne Virginie Sullé ("Un ange dans le ciel"); un moment beau et très poignant, mais il se pose également dans une introspection ("Qui suis-je") faisant par-là un état des lieux de sa vie, de ce qu'il est.

Car Dernier Round parle de lui-même. L'heure est au bilan. Le temps de dresser les constats et de régler quelques comptes aussi ("Les médias"). Il a toujours rejeté le système pourri et corrompu des médias servant de marionnettes aux politiques. Sorti sur son propre label IV My People, Dernier Round, malgré quelques faibles passages, est un album qui mérite qu'on s'y attarde, surtout sur la fin.
Je le dis et le répète, Kool Shen est l'un des tous meilleurs MC que la France ait pu connaître à ce jour.
Il le démontre une nouvelle fois.

Mention spéciale à "Les médias", "Quand j'prends le mic" et le featuring avec Oxmo Puccino "Dernier Round". 

1 1er Round 0:48
2 On a enfoncé des portes 3:28
3 C'est mal barré 3:53
4 Y suffit d'un rien 3:44
5 Two Shouts IV My People 3:52
6 Dans mon coin (Interlude) 1:49
7 Qui suis-je ? 3:36
8 Change de style 4:14
9 93.2 radio (Interlude) 0:47
10 Le retour du babtou 3:02
11 Oh No 4:22
12 Un ange dans le ciel 3:50
13 Les médias 3:20
14 Quand j'prends le mic (Remix) 3:42
15 Dernier Round 4:20

Label: IV My People / MYP M24-2

K-Mel - Réflexions (2001) (Creil, FR.)

K-Mel se lance en solo après le split d'avec Alliance Ethnik. Et le moindre que l'on puisse dire c'est que son unique album ne restera pas dans les mémoires. Surfant alors sur la vague de la french touch fraîchement laissée par son ancien groupe sur certains artistes US qui n'y étaient pas insensibles, il se voit associé sur certains morceaux par quelques pointures; Nate Dogg et son pote Warren G ("Regulate", rappelez-vous), Cunnie Williams et surtout Phife Dawg de A Tribe Called Quest ! Jolie brochette.

Hormis ces morceaux de l'album, le reste, sans être mauvais, ne casse pas trois pattes à un canard. C'est un mélange de rap, rnb, des moments funk parsemés, le tout servi sur un beat le plus souvent east-coast boom bap. Faut dire que ses références musicales se trouvent sur la cote est des States, déjà quand il était avec Alliance Ethnik. Ainsi le meilleur morceau reste sans conteste "Solo Mouvement" (ah ces touches jazzy Questiennes !) Phife Dawg; pas étonnant quand on connait la carrière du monsieur avec ATCQ. You know what I'm sayin!?

Pourtant avant cette chanson l'histoire était mal engagée. "Bitch", "Question de langage" et "J'écris pour ma liberté" partaient du mauvais pied. Lyrics et beats assez pauvres. Mais la suite rattrape et fait (presque) oublier ce faux pas. "Mon microphone est mon seul ami" est lui aussi une bonne surprise; un titre dansant, frais et funky en feat avec Cunnie Williams. Si tout l'album avait été de ce tonneau, je pense que j'aurais kiffé.
Un autre problème ici c'est la longueur. Plus de 71 minutes pour un album de hip-hop c'est dur à avaler, surtout quand ça part dans tous les sens avec des thèmes pas toujours cohérents les uns avec les autres. Genre un pot-pourri où K-Mel aurait mis tous ses post-its en chansons. Donc pas vraiment de fil conducteur à cet album même si, je le répète, il y a des passages agréables et intéressants.

Au final, on ne reverra plus K-Mel enregistrer un opus. Si je ne me trompe pas, il se serait retiré du monde de la musique pour s'installer dans l'arrière-pays héraultais pour élever des chèvres ou un truc comme ça.
Non, non c'est pas des conneries. 

1 Intro 1:57
2 Bitch (Je n'appelle pas les femmes...) 4:46
3 Question de langage 5:19
4 J'écris pour ma liberté 4:19
5 Solo Mouvement 4:55
6 Fonk You 4:21
7 Définition 4:36
8 Mon but est fixé 3:51
9 West "Chino" Coast Interlude 0:54
10 Réflexions 3:49
11 Je ne change pas de nom 4:54
12 Warren G & K-Mel - I Want It All 4:03
13 12 ans d'absence 4:40
14 Bizness 4:31
15 Mon microphone est mon seul ami 4:28
16 Plus hip-hop que qui ? 4:07
17 Creil City 2000 3:54
18 Outro 1:57

Label: Delabel / 7243 8505172 2

H.S.D. - Lungs Like a Rasta (1997) (Los Angeles, CA.) [EP]

Je suis toujours plus laxiste quand il s'agit de noter des artistes inconnus. H.S.D. c'est le sigle de High School Dropouts; grosso modo les "recalés du bahut". Ça en dit long sur les deux membres du combo (Marc da Murdurah et Meen Green). Trainer dans les rues, s'adonner à des activités pas très catholiques, fumer de la weed. Le titre de cet EP ne laisse planer aucun doute d'ailleurs; "Les poumons d'un rasta".

Effectivement quand on écoute cette unique sortie des deux gars de Los Angeles, on navigue dans les effluves d'un aquarium allongeant de longues tafs de oinjs qui tournent, et qui tournent, et qui tournent. La tête aussi tourne. Perso je ne suis pas un smoker, mais l'esprit me plait assez.
En ce qui concerne la musique proposée, on est loin, très loin de leurs coreligionnaires ouest américain. Aucun morceau ne se départit du reste; ce qui est la seule homogénéité à cet EP. Rien de foncièrement mauvais mais rien de transcendant non plus. Tout y est moyen. Trop. Et puis y a cette production très roots, au bord de l'amateurisme, le genre de truc qui a l'air d'avoir été enregistré dans une chambre ou un local bas de gamme.

Pour collectionneurs hip-hop fans de raretés. 

A1 Lungs Like a Rasta
A2 Juicy Interlude
A3 Despite
A4 Far From A...
A5 420 Team
B1 H.S.D.
B2 Tape It Off
B3 Cement Boxin' Gloves
B4 Lungs Like a Rasta (Instrumental)

Label: Beats and Rhymes Records / BAR-1420

All City - Metropolis Gold (1998) (Brooklyn, NY.)

Citer Plutarque dans une review de hip-hop, c'est tellement improbable que j'en souris. Barba non facit philosophum, "la barbe ne fait pas le philosophe". Voilà comment pourrait se caractériser cet opus. Voilà en quoi je pourrais définir le nombre misérable de notes qui entourent cet album absolument inconnu (pourtant sur une major).
All City c'est un short-lived combo de Brooklyn qui a enregistré un unique album et sorti quelques singles l'environnant. Et pi basta. Pourtant y a du beau linge dans cette galette. Visez un peu. DJ Premier à la prod sur "The Actual", Pete Rock sur "Priceless", Onyx en featuring sur "Xtreme", Rockwilder à la prod ("Stay Awake", "Get Paid" et "Move on You") ainsi que DJ Clark Kent avec "The Hot Joint". En somme pas des puceaux de studio. Donc étonnant que ce groupe n'ait pas rameuté plus d'infos sur la toile. Parce que laissez-moi vous dire qu'on a ici affaire à quelque chose qui vaut son pesant de M&M's. Oui, je le clame haut et fort et l'assume pleinement; cet album est excellent.
Un seul essai mais quelle transformation ! Plus d'une heure sans faux pas, des beats accentués par endroits de touches jazzy du plus bel effet, des passages encore plus smoothie ("Live It Up") avec les Native Soul et "Daydreaming" où le r&b fait son petit effet. Le reste du gâteau nous propose du hip-hop boombapien de la Côte Est (pléonasme en quelque sorte) mais sans forcer sur les doses hardcore. Et c'est là que ça me plait. Les All City ne sont pas des bourrins, ils arrondissent les angles et me font penser à un mix entre les Digable Planets, les Beatnuts et la douceur lénifiante de A Tribe Called Quest comme sur les morceaux "Just Live" et "Favorite Things" (rien à voir avec John Coltrane).

Trêve de bavardage. Allez écouter cette galette, c'est un ordre. 

1 Who Dat (Skit)
2 Stay Awake
3 Priceless
4 Metrotheme
5 Xtreme
6 The Hot Joint (Remix)
7 The Actual
8 NY Live It Up
9 Afta Hourz
10 Ded Right
11 Get Paid
12 Timez Is Hard
13 Daydreaming
14 Favorite Things
15 The Hot Joint
16 Move on You (Remix)
17 Just Live

Label: MCA / MCASD 11829


mardi 12 mai 2015

Canibus - Rip the Jacker (2003)

(Don't Fear) The...Ripper !

 Rip the Jacker (un des autres surnoms de Canibus) est une contrepèterie de Jack the Ripper, le fameux tueur en série connu en France sous le nom de Jack l’Éventreur. 

Si on m'avait dit hier que j'allais écouter un album first class avec des morceaux exceptionnels de série qui soient hors des sentiers battus et balisés des charts du hip-hop, je ne l'aurais primo pas cru, et deuzio je pense même que j'aurais misé un de mes testicules sur le marché du prêt sur gage. Donc je me suis évité d'être équipé d'une seule valseuse à l'heure où je vous parle. Perso ça m'arrange.
Comment pouvais-je m'imaginer un seul instant que dans les "classiques" du hip-hop allait s'immiscer un album inconnu du grand public ? oserais-je dire inconnu tout court.
Car Germaine Williams aka Canibus envoie un album bousculant les codes, les classements et les styles. C'est d'autant plus gratifiant qu'il le fait seul. Très rares sont les albums de rap où il n'y ait pas de featurings, pas de collaborations, enfin bref quelqu'un qui vienne apporter son concours. Ici le type se la fait en solo (en plus de l'écriture des textes) et c'est là que je lui tire mon chapeau car tenir sur la longueur d'un album en maintenant une telle qualité dans les lyrics, les beats, le flow, la manière dont c'est amené ainsi que l’enchaînement des morceaux. Et comme le souligne Kilian Murphy dans Stylus Magazine, « Canibus is characterized for his "deep vocabulary, scientific concepts, battle rhymes and descriptive imagery" throughout the album.
» Voilà un résumé qui colle parfaitement à l'atmosphère qui règne dans cet opus ; un vocabulaire riche, des métaphores, de l'abstraction mêlée à la réalité avec une grande variété d'ambiances dans chaque morceau. C'est ce qui en fait un album particulier, style qu'on retrouve dans les productions d'abstract hip-hop, voire dans l'experimental

En fait, cette pièce de 45 minutes ne souffre d'aucune faille ; c'est le vol long courrier dont on rêve en secret, niché dans un coin, dans l'ombre, en cherchant une once de clarté. Ce petit faisceau lumineux qui nous donne(rait) tant de joie, de plaisir. L'âge d'or du rap se trouve dans les nineties mais le début du nouveau siècle a connu son lot de bonnes trouvailles, voire de masterpieces. Cet album en est un sans aucun espèce de doute. Je pense qu'il me faudrait plusieurs pages pour en faire la dithyrambe complète. Il regorge de détails, de samples empruntés au rap mais pas seulement (un sample pris à Portishead et son morceau "Wandering Star" ici avec "Psych Evaluation" et même à du fado avec les touches de guitares empruntées à "A Sombra (Fado Nocturno)" d'António Chainho). Ces deux exemples sont typiques de l’atmosphère parfois éthérée (le Cloud Rap qui viendra plus tard) qu'on retrouve disséminée ça-et-là, des accents orientalisants ("Levitibus") se laissent même s’entrapercevoir.
La mine d'or se trouve à tous les coins des 45 minutes, rien n'est laissé au hasard. La production signée Stoupe the Enemy of the Mankind (membre de Jedi Mind Tricks) l'est pour beaucoup. Le bonhomme a quand même été classé selon plusieurs sources, dans les 50 meilleurs producteurs de hip-hop. C'est pas rien quand on connaît la concurrence. Certes c'est pas DJ Premier non plus Pete Rock mais ça vaut son pesant sur le marché de la cacahuète, surtout pour une prod relativement underground sur un label qui l'est tout autant.

J'annonce : cet album est une sacrée mandale dans la gueule.
Je vais de ce pas commander l'album.
5 stars cash et je paye en petites coupures.

1 Intro 0:32
2 Genabis 4:12
3 Levitibus 4:00
4 M-Sea-Cresy 3:50
5 No Return 4:53
6 Spartibus 4:00
7 Indisible 3:59
8 Showtime at the Gallow 4:41
9 Psych Evaluation 3:51
10 Cemantics 3:40
11 Poet Laureate II 7:18

Label: Babygrande / BBG-CD-005

V.A. - Harlem World : The Sound of the Big Apple Rappin' (2001) [Compilation]

Les compilations de hip-hop ne manquent pas, qu'elles retracent une époque, un pays, un groupe-phare encore d'illustres inconnus. Ici c'est la première et dernière catégorie dont il est question, plus celle d'une ville ; à savoir New York, et plus particulièrement le borough de Harlem. Le titre de la compil parle de lui-même. Sorti sur un tout petit label (Heroes & Villains), ce double-CD offre bon nombre de satisfactions pour celle ou celui voudrait commencer sa culture des origines du rap au pays des B-Boys. 17 morceaux couvre les premières années (1979-81). Mais attention, tout est rareté. Point de titres connus, excepté le premier de Afrika Bambaataa. Le reste c'est du old school imprimé sur des labels indépendants, et certains singles vont jusqu'à 1500$ en pressage original ! Bref, du bon vieux son (si on enlève le très inutile et mauvais "Rappin' Ain't No Thing" des Boogie Boys) qui mélange ou alterne disco-rap, boogie et des touches de funk. Deux heures de musique vous attendent dans ces 2 CDs (66 et 55 minutes). Une compilation aussi importante dans l'histoire du hip-hop que la rareté des morceaux présents.

1.1 Afrika Bambaataa Zulu Nation Cosmic Force - Zulu Nation Throwdown 7:11
1.2 Harlem World Crew - Rappers Convention 6:24
1.3 Little Starsky - Dancin' Party People 7:57
1.4 Mr. Magic & Positive Choice Band - 2001 Kazoo's 7:15
1.5 Grand Wizard Theodore & The Fantastic Romantic 5 - Can I Get a Soul Clap "Fresh Out the Pack" 7:31
1.6 Boogie Boys feat. Kool Ski, Kid Delight, Disco Dave With DJ Darryl C - Rappin' Ain't No Thing 6:05
1.7 Family Four - Rap Attack 10:28
1.8 Spyder-D - Big Apple Rappin' (National Rappin' Anthem) 10:09
1.9 Kurtis Blow - Do the Do 3:03

2.1 Harlem World Crew - Love Rap 6:04
2.2 T.J. Swan - And You Know That 7:31
2.3 The Marvelous Three & Younger Generation - Rappin' All Over 8:52
2.4 Busy Bee - School Days 3:53
2.5 Dr. Jeckyll & Mr. Hyde - Doing the Do 7:16
2.6 Bambaataa Zulu Nation Soul Sonic Force - Zulu Nation Throwdown (Part 2) 6:11
2.7 Disco Dave and the Force of the Five MC's - High Power Rap 7:36
2.8 Rappermatical 5 - Party People 6:52

Label: Heroes & Villains / HEROCD01 

 

Mafia K-1 Fry - La cerise sur le ghetto (2003) (Vitry-sur-Seine, FR.)

Mafia K-1 Fry c'est la big team française du hip-hop du début du siècle et, à l'instar du Wu-Tang Clan y a une flopée de gonzes et affiliés. Les membres de 113 se sont greffés à l'équipe et cet album apparaît dans le paysage rap frenchie comme un acte important. Perso j'avais écouté La cerise... en 2004 si ma mémoire est bonne. C'est mon cousin qui m'avait fait découvrir le CD. Quelques morceaux m'avaient à l'époque bien accroché ("La cerise sur le ghetto", "En bas des tours" et le catchy "Official"). Dix piges plus tard je redécouvre le groupe non plus dans sa forme FM mais sur la longueur d'un album. C'est la mesure-étalon pour juger la rigueur et l'homogénéité. Et franchement j'ai été très surpris par la qualité des morceaux mais surtout de la prod. Sur l'ensemble des 70 minutes, y a vraiment d'excellents passages dans lesquels il y a un souci du détail, un travail important des beats, du mixage et du mastering. Tom Coyne aux manettes. Pas étonnant que la qualité du disque soit si bonne. Le type a bossé avec les meilleurs. Visez un peu les références. UGK, The Roots, GZA, Digable Planets, De La Soul, A Tribe Called Quest, et j'en passe. Fatalement y a pas de surprise. Une grande équipe sans prod ni mastering ne servira à rien. Ici tout ou presque est réuni pour donner à l'auditeur tout ce qu'il recherche dans le hip-hop et, hormis quelques titres un peu légers et faiblards ("Lourd", "Nuage de fumée", "Rabzouz"), le reste est très bon. 
Mention spéciale à "Pour ceux", "En bas des tours" et "Rusé" qui remportent mes suffrages. 
Vraiment un très bon album français de rap.

1 Intro 1:34
2 Pour ceux 6:07
3 C.B.R. 5:43
4 Lourd 3:50
5 En bas des tours 3:55
6 Stoty Mafia 4:24
7 Elle 4:31
8 Balance 4:51
9 Liberta 3:49
10 La cerise sur le ghetto 5:49
11 Official 4:01
12 L'État 4:19
13 Nuage de fumée 2 4:53
14 Rabzouz 4:11
15 F.U.C.K. ton pote 3:31
16 Rusé (La gamberge) 5:22

Label: S.m.a.l.l. / SMA 511284-2 

lundi 11 mai 2015

Chef Raekwon - Only Built 4 Cuban Linx... (1995) (Brooklyn, NY.)

Préambule
Avec le Liquid Swords de GZA sorti quelques mois plus tard, ce Only Built 4 Cuban Linx... est ce qui est arrivé de mieux post-36 Chambers. Explications.

Bon pour commencer, Raekwon est sans doute le membre du Wu-Tang Clan que je préfère. Style inimitable, débit et voix eux aussi détectables de suite. Il incarne le top rappeur par excellence. A la fois exubérant dans ses attitudes, il sait également mettre de l'eau dans son vin, en témoigne cet album. Dans le monde du hip-hop c'est typiquement la figure des deux tranchants de la lame ; d'un côté le son hardcore qui coule dans ses textes et de l'autre les angles arrondis par des mélodies et beats qui visent toujours dans le mille, distillés par RZA, aka le faiseur de miracles.

Comme pour bon nombre d'albums que j'ai écoutés et non encore notés ni plus reviewés, Only Built 4 Cuban Linx... fait partie de cette frange (très rare) de productions exceptionnelles dont est important de parler et souligner. Et pas seulement pour les afficionados du hip-hop, mais aussi et surtout pour un public non averti à ce genre musical; à savoir le hardcore hip-hop. Mais il serait réducteur de s'arrêter là car cet album est un condensé, un mélange, un melting-pot de ce que la musique a à nous offrir. Une heure et dix minutes pendant lesquelles Raekwon et tous les membres du Wu-Tang Clan (excepté l'absence de Ol' Dirty Bastard, allez savoir pourquoi. Il était pitet en taule...) créent un maelstrom incroyable et envoûtant autour de flows, de beats acérés mais également sous-jacentes en background.

Only Built... est de ces opus qui vous fout une claque dès la première écoute, quelque chose se passe immédiatement dans votre tête. Le tourbillon acoustico-lyrique s'accroche sans vous lâcher du début à la fin. Les associations en featuring sont top-niveau classe mondiale, et pour la toute première fois dans le monde du Wu-Tang Clan, un rappeur extérieur vient apporter son concours sur un titre (Nas sur "Verbal Intercourse"), et ça donne là aussi une qualité qui dépasse l'entendement.
C'est la 3è ou 4è fois que je ressens pareils sentiments à l'écoute d'un album de hip-hop, après le Enter the Wu-Tang (36 Chambers) du Wu-Tang Clan, The Infamous de Mobb Deep et le Endtroducing..... de DJ Shadow; tous trois notés 5*. Ainsi que Liquid Swords cité en intro. C'est dire.  

Creusons...

Raekwon établit un parallèle entre les destinées des membres du Wu-Tang Clan et ceux d'une famille de la mafia. Hormis cette parabole peu évidente à saisir, Only Built 4 Cuban Linx ouvre effectivement la voie du gangsta rap west-coast qui ne va pas tarder à exploser avec All Eyez on Me de 2Pac l'année suivante.

Le plus surprenant dans OB4CL, c'est son climat étonnamment apaisé. Raekwon arrive à alléger les rythmiques du gangsta rap tout en conservant les bruitages de rue et autres dialogues estampillés comme tels. Au lieu d'une menace permanente, c'est plutôt une sorte de reportage auquel se livrent Raekwon et RZA. Un seul skit vient s'immiscer dans un flow quasi discontinu de 18 morceaux, et justement en plein milieu comme pour nous signifier que c'est l'entracte. Allez chercher du pop-corn et revenez écouter la suite. Acte II. La suite ? le premier acte est de très haute volée mais le second est selon moi un modèle du genre. Alors que je situerais la première partie dans un cadre pluvieux, humide et venteux, la seconde passe de cette atmosphère mortifère ("Criminology", "Guillotine (Swordz)" et "Rainy Dayz") à la cryogénisation comme en attestent les titres "Ice Water", "Glaciers of Ice" et "Ice Cream". Et l'avant-dernière piste "Heaven & Hell" assoit encore mieux le passage entre les deux mondes ; le chaud et le froid. Ou plus métaphoriquement la confrontation entre le Mal et le Bien. Cet opus résume très bien cette dichotomie détenue dans ce titre. A la fois l'Enfer sur Terre et le Paradis rédempteur.
Ce glissement syntaxique donne à la thématique de l'album tout son sens, à l'instar d'une pièce de théâtre dans laquelle les personnages seraient amenés à jouer des scènes dans des environnements bien distincts. On peut presque parler de concept-album quand on cite ce premier essai de Raekwon au regard de tout ce que j'ai dit précédemment. C'est même implacable finalement. Une espèce d'estampille au Clan et ses membres.

Passé le constat rhétorique et l'ambiance générale, il est selon moi clair et définitif que cette production est l'une des plus importantes et déterminantes dans le hip-hop. Sur Only Built... le hardcore east-coast s'entremêle à l'envi avec les atmosphères qu'on retrouvent dans l'horrorcore ("Rainy Dayz" et "Guillotine" par exemple), avec des éléments plus lénifiants comme sur "Verbal Intercourse" et le remix de "Can It Be All So Simple" présent avec sa forme première sur 36 Chambers. Et ces fameuses atmosphères propres au Wu-Tang ; à savoir le côté épique des films de kung-fu retranscrit spécifiquement sur des titres-phare tels "Criminology" et "Guillotine (Swordz)". Voilà quelques exemples et pistes pour lire cet album.

Construit pour durer

J'aurais tellement de choses à dire en plus concernant ce Only Built... mais je crains d'y passer des heures. En résumé, il apparaît comme un album de hip-hop qui aura marqué son époque de par sa conception, production, construction et écriture. A l'heure actuelle, je ne vois aucun opus capable de rivaliser sur tous les points que j'ai cités plus haut. (durée, nombre de morceaux, atmosphère(s), histoire,...)

Album intouchable et unique.

1 Striving for Perfection 1:43
2 Knuckleheadz 4:05
3 Knowledge God 4:27
4 Criminology 3:49
5 Incarcerated Scarfaces 4:30
6 Rainy Dayz 5:17
7 Guillotine (Sworz) 4:21
8 Can It Be All So Simple (Remix) 4:10
9 Shark Niggas (Biters) 1:39
10 Ice Water 4:02
11 Glaciers of Ice 4:54
12 Verbal Intercourse 4:07
13 Wisdom Body 2:34
14 Spot Rusherz 3:51
15 Ice Cream 4:16
16 Wu-Gambinos 4:58
17 Heaven & Hell 3:58
18 North Star (Jewels) 4:00

Label: Loud Records / 07863-66663-2


 

O.C. - Jewelz (1997) (Brooklyn, NY.)

O.C. faisait partie des supergroupes Crooklyn Dodgers et D.I.T.C. au milieu des nineties et le moindre qu'on puisse dire est que ses deux premiers albums en solo sont de très belles réussites.
Après un premier et excellent Word...Life en 1994, le revoici trois ans plus tard avec Jewelz. Encore meilleur. Franchement, en ayant écouté le 1er opus, je ne pouvais imaginer que celui-ci le dépassât. Et pourtant - mis à part le relatif moyen "Far From Yours", l'apport vocal de Yvette Michele donne un côté RnB pas désagréable en soi mais venant "casser" la belle machine de l'album selon moi. Enfin bref pas de quoi non plus se plaindre mais quand je vois le reste de la galette, je me dis que c'était pas forcément nécessaire de claquer ce genre de titre.
Car côté bright side of the moon, y a beaucoup à se mettre sous la dent. Hormis le titre susnommé, tout est digne de figurer dans une compilation de hip-hop. On est de suite mis dans le grand bain dès le morceau introducteur "My World" ; modèle du genre east-coast boom bap avec une production racée de DJ Premier (pléonasme, car DJP a des beats que lui seul peut sortir d'une platine). Un titre qui casse la baraque d'entrée. Et ce n'est pas de la poudre aux yeux comme on peut en trouver ça et là, car la suite lui donne raison où le duo Organized Konfusion vient apporter son concours sur "War Games" ; là encore une prod de Preemo. La touche jazzy en plus qu'un Pete Rock n'aurait pas reniée. C'est vers "The Chosen One" que mon coeur balance le plus. Cette piste me montre une nouvelle fois que la finesse est aussi une facette du rap. C'est de la dream hip-hop en fait ce morceau, couplée à une atmosphère jazzy-lounge hyper relaxante. Check this out! Probablement le moment de l'album le plus lénifiant. Merci Buckwild pour la prod. Saut de puce sur "Stronjay". Cette fois-ci c'est du côté de Da Beatminerz qu'il faut se tourner pour une production rendant ce passage des plus zen. Je le mettrais quasiment au même niveau que "The Chosen One" niveau hypotension et relaxation du cortex. Deux pistes terriblement addictives. Vérifiez donc. Moi qui adore le rap jazzy et le hip-hop east coast estampillé boom bap 'tranquille le chat', je suis servi là. Les cinq derniers morceaux de l'album viennent asseoir un peu plus ce que je viens de dire. La qualité générale mérite d'être saluée, la production est irréprochable avec des pointures qu'on ne présente plus (Buckwild, DJ Premier, Da Beatminerz, Showbiz, Lord Finesse). Et une mention spéciale à DJ Ogee qui lui aussi gagne à être (re)connu car ses deux beats ("Can't Go Wrong" et "You & Yours") sont excellents.

Au final c'est un album que tout amateur de hip-hop devrait écouter, et accessoirement le placer sur la pile du haut des productions du genre. 

1 Intro 0:31
2 My World 4:16
3 War Games 3:30
4 Can't Go Wrong 3:45
5 The Chosen One 4:35
6 Dangerous 4:15
7 Win the G 5:44
8 Far From Yours 4:58
9 Stronjay 5:06
10 M.U.G. 3:21
11 The Crow 4:27
12 You & Yours 4:22
13 Hypocrite 2:31
14 It's Only Right 3:53
15 Jewelz 5:55

Label: Payday / 314-524-399-2

DJ Premier - Signature Sounds Vol.1 (2004) [Compilation]

Voilà une compilation qui casse la baraque et incendie les maisons environnantes. Elle regroupe une sélection de 46 morceaux produits par DJ Premier allant grosso modo du début des années 90 à 2003. C'est selon moi la prod du boss qu'il faut avoir. Et le titre parle de lui-même - "Signature Sounds" - y a pas plus clair comme nom. Effectivement, pendant 3 heures vous en prenez plein les oreilles. De titres connus "Return of the Crooklyn Dodgers", "Thick", "A Million and One Questions / Rhyme No More", "MC's Act Like They Don't Know" et "Mathematics", on a également droit à des choses beaucoup plus underground comme "Gotcha Back", "Rock Stars", "Intruder Alert", "F.A.Y.B.A.N." (Fuck All Y'all Bitches Ass Niggas dans le texte) ou encore le superbe "Love Is Gone" de Jaz-O & The Immobilarie.
DJ Premier porte vraiment bien son nom. Certains usent de nicknames parfois risibles voire totalement en inadéquation avec leur talent, lui, en revanche, prouve depuis la fin des années 80 que c'est lui le patron dans la cour de récré. Les connaisseurs comprendront. Les autres doivent savoir que ce type est aux platines et autres tables de mixage ce que Johan Cruijff était au foot néerlandais (bah oui chacun ses références) ; à savoir une institution.
Perso j'aurais aisément rajouté 1 voire 2 CDs en mode box set. Eh Chris, ça te dirait pas d'y penser ? Si oui je fais de suite une pré-commande. 

  • 1.1 A.G. - Weed Scented 3:30
  • 1.2 Big Daddy Kane - Any Type of Way 3:58 
  • 1.3 Big L - Ebonics (DJ Premier Remix) 3:00 
  • 1.4 Craig David - 7 Days (DJ Premier Remix) 4:24
  • 1.5 The Crooklyn Dodgers - Return of the Crooklyn Dodgers 5:04
  • 1.6 D'Angelo - Devil's Pie 5:21
  • 1.7 D.I.T.C. - Thick 3:45
  • 1.8 Ed O.G. - Sayin' Somethin' 2:59
  • 1.9 Fat Joe - Dat Gangsta Shit 2:52
  • 1.10 Freddie Foxxx - Lazy! 4:28
  • 1.11 Gang Starr - Battle (Soundtrack Version) (Edit) 2:56
  • 1.12 Gang Starr - Tha Squeeze 3:27
  • 1.13 Gang Starr - The Natural 2:47
  • 1.14 Group Home - The Legacy 4:01
  • 1.15 Heather B. - Steady Rockin' 3:50
  • 1.16 Jadakiss - None of Y'All Betta 3:37
  • 1.17 Janet Jackson - Together Again (DJ Premier 100 in a 50 Remix) 5:23
  • 1.18 Jay-Z - A Million and One Questions / Rhyme No More 2:59
  • 1.19 Jay-Z - So Ghetto 4:01
  • 1.20 Jaz-O & The Immobilarie - Love Is Gone 4:07
  • 1.21 Jeru the Damaja - Ya Playin' Yaself 3:46
  • 1.22 Just-Ice - History 3:11
  • 1.23 KRS-One - MC's Act Like They Don't Know 4:42   

  • 2.1 KRUMB SNATCHA - Incredible 3:42
  • 2.2 Lady of Rage - Unfuckwitable 3:41
  • 2.3 M.O.P - Follow Instructions 3:47
  • 2.4 M.O.P - Roll Call 4:03
  • 2.5 Macy Gray - I've Commited Murder (Gang Starr Remix) 4:33
  • 2.6 Mos Def - Mathematics 4:07
  • 2.7 Nas - N.Y. State of Mind, Part 2 3:36
  • 2.8 Nas - Nas Is Like 3:57
  • 2.9 Non Phixion - Rock Stars 4:00
  • 2.10 NYG'z - Giantz ta Thiz 3:47
  • 2.11 Pitch Black - It's All Real 3:59
  • 2.12 Rah Digga - Lessons of Today 3:47
  • 2.13 Rakim - When I B on tha Mic 3:42
  • 2.14 Rise and Shine - Gotcha Back 3:18
  • 2.15 Royce da 5'9" - Boom (12" Street version) 3:53
  • 2.16 Sauce Money - Intruder Alert 4:25
  • 2.17 Screwball - F. A. Y. B. A. N. 3:05
  • 2.18 Snoop Dogg - The One and Only 3:49
  • 2.19 Sonja Blade - Look 4 tha Name 3:42
  • 2.20 The Notorious B.I.G. - Kick in the Door 4:46
  • 2.21 The Notorious B.I.G. - Rap Phenomenon 4:04
  • 2.22 Da Ranjahz - Inspiration 4:33
  • 2.23 Xzibit - What a Mess